Petit dernier d’une fratrie de cinq enfants, Jean Delhoume est né à Charroux en 1849 dans une famille d’agriculteurs, petits propriétaires. Rien ne le prédestinait au professorat, son frère Gabriel de 19 ans son aîné est d’ailleurs recensé en 1850 avec un niveau d’instruction de 0.

Pourtant, Jean entre finalement à l’Ecole Normale de Poitiers. Après avoir eu son diplôme en août 1869 et enseigné quelques temps à Poitiers, il prend son premier poste à Availles près de Châtellerault le 19 août 1872. Availles est alors un petit village de 704 habitants. 

C’est, à travers son dossier de l’inspection académique, que j’ai pu en savoir un peu plus sur Jean et son métier grâce aux compte-rendus des trois inspections. 

Portrait de Jean en 1859

Jean est l’unique professeur de cette école mixte où sont inscrits une soixantaine d’élèves garçons et filles sur les 102 enfants de 5 à 13 ans en âge de fréquenter l’école. La classe est séparée en deux parties : filles d’un côté, garçons de l’autre.

L’instituteur s’est installé dans le logement fourni par la commune. Logement d’ailleurs très spacieux pour un jeune homme célibataire puisqu’on y trouve, au rez-de-chaussée, une cuisine et une salle et à l’étage une chambre à coucher et deux grands cabinets auxquels s’ajoutent une cave, un grenier et un pied. L’instituteur possède aussi son propre jardin de 6 ares dont l’inspecteur dira qu’il est bien entretenu.

D’après l’inspecteur : « M. Delhoume est intelligent et assez actif. Sa conduite est très bonne ainsi que ses principes. Il est très bien vu des autorités et des familles.« 

L’école n’est pas encore obligatoire et gratuite. Les lois de Jules Ferry n’ont pas encore été adoptées, elles ne le seront qu’en 1882. L’assiduité n’était d’ailleurs pas le propre des élèves de l’école. Lors d’une inspection en août 1874, sur 58 inscrits, seuls 18 enfants sont présents. L’inspecteur remarque d’ailleurs que :  » Des élèves s’en vont chez eux avant la fin au gré des parents« .

Et la discipline n’est pas toujours au rendez-vous : « on remue et on bavarde parce qu’on n’est pas assez occupé« .

L’inspecteur signale un manque de propreté chez les élèves ainsi qu’un faible niveau : « des oreilles sales, cheveux non peignés, mains non lavées« 

Les murs de la classe nécessiteraient d’être passés à la chaux. Mais la mairie qui s’est endettée pour la construction ne compte pas mettre un centime dans le bâtiment tant que l’emprunt n’est pas remboursé. 

Est-ce la difficulté d’enseigner dans ces conditions qui décourage Jean ou une préférence pour l’enseignement aux jeunes adultes plutôt qu’aux enfants mais, dès la première année à Availles, Jean demande sa mutation en Ecole Normale.

Le 8 octobre 1874, il est nommé à l’Ecole Normale de Montbrison (Loire). Moins d’un an plus tard, le 31 août 1875, il est muté à l’Ecole Normale de Châteauroux où il passera toute sa carrière.

En 1882, il en devient l’économe.

Il est fort possible qu’il soit d’ailleurs présent sur cette photo de 1897 qui présente le personnel de l’Ecole Normale (trouvée sur le site du Musée de l’Education Nationale)

En 1909, il obtient une pension civile et se retire dans la commune de Montipouret.  

J’ai longtemps cru que Jean avait coupé les ponts avec sa famille restée dans le sud Vienne : pas de membre de la famille à son mariage, ni à la naissance de ses trois filles. Mais deux de ses filles se marient en 1916 et 1917 à Montipouret avec Octave et Norbert Delhoume, petit-fils de son frère ainé Gabriel.

Sources